Mesure finie

Sur un espace mesurable ( X , A ) {\displaystyle (X,{\mathcal {A}})} , une mesure finie (ou mesure bornée) est une mesure positive μ pour laquelle μ(X) est fini, ou plus généralement une mesure signée, voire une mesure complexe dont la masse | μ | ( X ) {\displaystyle |\mu |(X)} (valeur sur X de la variation totale |μ| de μ) est finie.

Fonctions intégrables

Toute fonction complexe f mesurable et bornée est intégrable contre toute mesure finie μ {\displaystyle \mu }  ; et on dispose de la majoration :

| X f . d μ | f . | μ | ( X ) {\displaystyle \left|\int _{X}f.d\mu \right|\leq \|f\|_{\infty }.|\mu |(X)}

Exemples de mesures finies

  • La mesure de comptage sur un ensemble X est finie ssi X est un ensemble fini.
  • Les masses de Dirac sont des mesures finies, quel que soit l'espace mesurable considéré.
  • Plus généralement, les mesures de probabilité sont des exemples de mesures finies : ce sont des mesures positives de masse 1.
  • La mesure de Lebesgue sur un domaine borné de ℝn.
  • Pour une mesure complexe ν pas nécessairement finie et pour une fonction ν-intégrable f, la variation totale de la mesure fν est exactement |f| |ν| ; de fait, la mesure fν est finie.

Suite décroissante des espaces Lp

D'après l'inégalité de Hölder ou celle de Jensen, les espaces Lp d'une mesure finie forment une famille décroissante pour l'inclusion, avec des injections continues. Plus précisément :

si  μ ( X ) < +  alors  0 < p q + L p ( μ ) L q ( μ )  car  f L q ( μ ) , f p μ ( X ) 1 p 1 q f q . {\displaystyle {\text{si }}\mu (X)<+\infty {\text{ alors }}0<p\leq q\leq +\infty \Rightarrow \mathrm {L} ^{p}(\mu )\supset \mathrm {L} ^{q}(\mu ){\text{ car }}\forall f\in \mathrm {L} ^{q}(\mu ),\|f\|_{p}\leq \mu (X)^{{\frac {1}{p}}-{\frac {1}{q}}}\|f\|_{q}.}

Une réciproque très forte est vraie : si μ est σ-finie et s'il existe p et q, avec 1 ≤ p < q ≤ +∞, tels que Lp(μ) ⊃ Lq(μ), alors μ est finie[1].

Espace des mesures finies

Toute somme de mesures finies (signées ou complexes) est une mesure finie. Toute mesure proportionnelle à une mesure finie est une mesure finie.

L'espace M ( X , A ) {\displaystyle \scriptstyle {\mathcal {M}}(X,{\mathcal {A}})} des mesures finies (signées ou complexes) forme un espace de Banach (réel ou complexe) pour la norme :

μ = | μ | ( X ) . {\displaystyle \|\mu \|=|\mu |(X).}

Pour toute mesure ν sur ( X , A ) {\displaystyle \scriptstyle (X,{\mathcal {A}})} (finie ou pas), l'application f fν induit une isométrie de L1(ν) sur un sous-espace vectoriel fermé de M ( X , A ) {\displaystyle \scriptstyle {\mathcal {M}}(X,{\mathcal {A}})} .

Lorsque ν est σ-finie, ce sous-espace auquel L1(ν) s'identifie est égal (d'après le théorème de Radon-Nikodym) à l'ensemble de toutes les mesures finies absolument continues par rapport à ν. Il est inclus dans le dual topologique de L(ν) :

L 1 ( ν ) ( L ( ν ) ) . {\displaystyle \mathrm {L} ^{1}(\nu )\subset \mathrm {(} L^{\infty }(\nu ))'.}

Cette inclusion est stricte (sauf dans les cas triviaux) car (L(ν))' est constitué des « mesures » (finies et absolument continues par rapport à ν) qui sont seulement finiment additives.

Exemple : inclusion stricte de 1 = M ( N ) {\displaystyle \scriptstyle {\mathcal {M}}(\mathbb {N} )} dans (ℓ)'

Si ν est la mesure de comptage sur ℕ, alors ν est σ-finie et l'absolue continuité par rapport à ν est automatique donc L1(ν) (qui s'écrit ici 1) s'identifie à M ( N ) {\displaystyle \scriptstyle {\mathcal {M}}(\mathbb {N} )} tout entier. L'inclusion de 1 dans le dual de se traduit par :

a 1 , b ,   a , b = a n b n . {\displaystyle \forall a\in \ell ^{1},\forall b\in \ell ^{\infty },~\langle a,b\rangle =\sum a_{n}b_{n}.}

Mais il existe des formes linéaires continues, sur l'espace des suites bornées, qui ne proviennent pas de cette façon d'un élément a de 1 : par exemple, sur le sous-espace des suites convergentes (en), on dispose d'une forme linéaire continue qui à toute suite convergente associe sa limite. On peut, par le théorème de Hahn-Banach, prolonger cette forme sur ce sous-espace en une forme continue sur donc en une « mesure finie » qui est seulement finiment additive sur ℕ puisque, bien que non nulle, elle s'annule sur chaque singleton.

Notes et références

  1. Voir par exemple (en) Walter Rudin, Real and complex analysis [détail des éditions] (lire en ligne), ou cet exercice corrigé du chapitre « Théorèmes de Banach-Schauder et du graphe fermé » sur Wikiversité.
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