Niveau d'un corps

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En algèbre, le niveau d'un corps (commutatif) F est le nombre minimum de termes dans une décomposition de –1 en somme de carrés si de telles décompositions existent, et l'infini sinon (c'est-à-dire si F est formellement réel). On le note s(F), la lettre s étant l'initiale du mot allemand Stufe. Albrecht Pfister a démontré que lorsque le niveau est fini, c'est une puissance de 2 et que réciproquement, toute puissance de 2 est le niveau d'un corps[1].

Puissances de 2

Si s(F) ≠ , il existe[1],[2] un entier naturel k tel que s(F) = 2k.

Démonstration

Soient s l'entier s(F), k l'entier tel que 2ks < 2k+1 et n l'entier 2k. Il existe des éléments non nuls e1, … , es de F tels que

0 = 1 + e 1 2 + + e n 1 2 =: a + e n 2 + + e s 2 =: b . {\displaystyle 0=\underbrace {1+e_{1}^{2}+\ldots +e_{n-1}^{2}} _{=:a}+\underbrace {e_{n}^{2}+\ldots +e_{s}^{2}} _{=:b}.}

Les éléments a et b sont tous deux des sommes de n carrés donc — d'après la théorie des formes de Pfister (en) — leur produit ab aussi, c'est-à-dire qu'il existe des éléments c1, … , cn de F tels que

a b = c 1 2 + + c n 2 . {\displaystyle ab=c_{1}^{2}+\ldots +c_{n}^{2}.}

Comme a est non nul par définition de k, on en déduit

1 = a b a 2 = ( c 1 a ) 2 + + ( c n a ) 2 , {\displaystyle -1={\frac {ab}{a^{2}}}=\left({\frac {c_{1}}{a}}\right)^{2}+\ldots +\left({\frac {c_{n}}{a}}\right)^{2},}

si bien que s(F) = n = 2k.

Caractéristique non nulle

Si F est de caractéristique p > 0 alors[3] s(F) ≤ 2.

Démonstration

Si p = 2 alors –1 = 1 = 12 donc s(F) = 1.

Si p > 2, le sous-corps premier de F est le corps fini Fp. L'ensemble S des carrés d'éléments de Fp est de cardinal (p + 1)/2 donc l'ensemble –1 – S aussi, si bien que leur intersection est un singleton donc est non vide : il existe deux éléments x et y de Fp tels que x2 = –1 – y2 donc –1 = x2 + y2.

Propriétés

Le niveau s(F) d'un corps F est relié à son nombre de Pythagore p(F) par[4] p(F) ≤ s(F) + 1 et même, si F n'est pas formellement réel[5],[6], s(F) ≤ p(F) ≤ s(F) + 1.

L'ordre additif de la forme (1) — donc l'exposant du groupe de Witt de F — est égal à[7],[8] 2s(F).

Exemples

  • Le niveau d'un corps quadratiquement clos est[8] 1.
  • Le niveau d'un corps de nombres est , 1, 2 ou 4 (« théorème de Siegel »)[9]. Des exemples sont respectivement[7] et les corps quadratiques ℚ(–1), ℚ(–2) et ℚ(–7).
  • Le niveau du corps fini Fq est[3],[8],[10] 1 si q ≡ 1 mod 4 et 2 si q ≡ 3 mod 4.
  • Si F est un corps local dont le corps résiduel k est de caractéristique impaire alors s(F) = s(k). Le niveau du corps ℚ2 des nombres 2-adiques est[9] 4.

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Stufe (algebra) » (voir la liste des auteurs).
  1. a et b (en) A. R. Rajwade, Squares, CUP, coll. « London Mathematical Society Lecture Note Series » (no 171), , 286 p. (ISBN 978-0-521-42668-8, lire en ligne), p. 13.
  2. (en) Tsit-Yuen Lam, Introduction to Quadratic Forms over Fields, AMS, coll. « Graduate Studies in Mathematics » (no 67), (ISBN 978-0-8218-7241-3, lire en ligne), p. 379.
  3. a et b Rajwade 1993, p. 33.
  4. Rajwade 1993, p. 44.
  5. Rajwade 1993, p. 228.
  6. Lam 2005, p. 395.
  7. a et b (en) John Milnor et Dale Husemöller (de), Symmetric Bilinear Forms, Springer, coll. « Ergebnisse der Mathematik und ihrer Grenzgebiete (en) » (no 73), , 150 p. (ISBN 978-3-642-88332-3), p. 75.
  8. a b et c Lam 2005, p. 380.
  9. a et b Lam 2005, p. 381.
  10. (en) Sahib Singh, « Stufe of a finite field », Fibonacci Quarterly, vol. 12,‎ , p. 81-82 (lire en ligne). Pour une preuve plus simple, il suffit de faire le même raisonnement que dans la preuve du critère d'Euler, en utilisant que le groupe multiplicatif de Fq est cyclique.

Bibliographie

(en) Manfred Knebusch (de) et Windried Scharlau (de), Algebraic Theory of Quadratic Forms. Generic Methods and Pfister Forms, Birkhäuser, coll. « DMV Seminar » (no 1), , 44 p. (ISBN 978-3764312060, lire en ligne)

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